Nouveau consensus autour des tests du microbiote : au lieu d’opter pour une solution de fortune, prendre en compte le contexte clinique
Un groupe de 69 experts mondiaux parvient à un nouveau consensus qui redéfinit les règles applicables aux tests du microbiote en mettant l'accent sur une surveillance rigoureuse, une méthodologie exhaustive et des données essentielles sur les patients permettant aux médecins traitants d’obtenir des réponses fiables concernant la santé intestinale.
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A propos de cet article
Auteur
Au cours des dernières années, l'idée d'utiliser le microbiote intestinal comme outil de diagnostic a stimulé l'imagination de la communauté médicale. Pourtant, malgré l’intérêt croissant qu’ils suscitent, il n’a toujours pas été démontré que les tests du microbiote produisent un quelconque bénéfice clinique.
Un rapport 1 de consensus international publié récemment tente de faire la lumière sur cette question importante. Menée par 69 experts originaires de 18 pays, l'initiative a pour but de définir un cadre clair, fondé sur des données probantes, pouvant servir de guide aux médecins traitants et aux laboratoires souhaitant normaliser leurs pratiques en matière de tests du microbiote.
69 experts
18 pays
Un groupe d’experts idéalement constitué
Le groupe, composé de médecins, de microbiologistes, d'écologistes microbiens, de biologistes informatiques et de bioinformaticiens, a appliqué la (sidenote: Méthode de Delphes (ou méthode Delphi) processus structuré permettant d'aboutir à un consensus d'experts par le biais de plusieurs tours d'enquêtes anonymes et de retours d'information. ) (ou méthode Delphi) pour émettre un ensemble de recommandations. Les experts ont été répartis en cinq équipes spécialisées qui se sont penchées respectivement sur les principes généraux, les procédures à suivre avant les tests, l'analyse du microbiote, les normes de reporting et la pertinence clinique.
Chaque recommandation a fait l'objet d'un examen rigoureux et a été évaluée à l’aide d’une échelle de Likert en appliquant un seuil d'accord de 80 % permettant de garantir que seules les recommandations fiables seraient retenues.
Ce processus méticuleux a révélé le besoin de mesures d'assurance qualité, d’un travail d'équipe multidisciplinaire et d'une communication transparente sur les limitations actuelles des tests du microbiote. Il a également mis en évidence un point fondamental : les tests ne devraient pas être commandés directement par les patients, mais être effectués uniquement sur recommandation médicale.
Les leçons à retenir du consensus
Les quatre recommandations ci-dessous sont INCONTOURNABLES pour tout médecin souhaitant utiliser le microbiote dans sa pratique clinique.
- Bannir l’accès direct des consommateurs aux tests : le groupe d’experts déconseille fortement aux patients de demander eux-mêmes des tests de leur microbiote. Dans l'idéal, face au risque d’erreurs d’interprétation et d'interventions incorrectes, les tests devraient être effectués à l’initiative d’un médecin ou d’un professionnel de santé habilité s’appuyant sur une solide justification clinique.
- Oublier le rapport F/B : les experts recommandent d’oublier le (sidenote: Rapport Firmicutes/Bacteroidetes indicateur autrefois consacré mais aujourd'hui contesté, comparant deux phyla bactériens majeurs de l'intestin, souvent associés (à tort) à la bonne santé ou à la maladie. ) , faute de preuves suffisantes de son utilité. Ils recommandent d’en faire de même avec les indicateurs de dysbiose d’usage courant car ils n’ont pas été validés. Selon eux, il convient plutôt de mettre l'accent sur l'établissement du (sidenote: Établissement du profil taxonomique analyse d'une communauté microbienne par l'identification et la classification de ses membres à différents niveaux taxonomiques, tels que le genre ou l'espèce. ) complet par séquençage de l'ARNr 16S ou du métagénome entier.
- Le contexte clinique est primordial : les rapports doivent inclure des (sidenote: Métadonnées cliniques données essentielles sur le patient (par ex., âge, régime alimentaire, traitements) qui accompagnent un échantillon et aident à interpréter les résultats des tests du microbiote dans un contexte médical. ) détaillées (âge, IMC, régime alimentaire, traitements) afin de faciliter l'interprétation des résultats. De même, les comparaisons avec des témoins appariés en bonne santé sont indispensables. Aussi étrange que cela puisse paraître, les fournisseurs de tests ne devraient pas donner de conseils thérapeutiques après l’analyse, cela devant rester du ressort exclusif du médecin traitant.
- Qualité et transparence : il est essentiel de faire appel à des laboratoires agréés de grande qualité utilisant des logiciels validés. Afin de garantir la transparence, il convient de rédiger un rapport détaillé couvrant l'ensemble du protocole de test, depuis la collecte de l'échantillon jusqu’à l'analyse elle-même.
Tout en reconnaissant que les tests du microbiote constituent une technique prometteuse pour certaines affections spécifiques, le groupe d’experts conclut qu’il n’existe pas encore de données suffisamment probantes pour en justifier l'utilisation clinique systématique. Il est donc essentiel de poursuivre les recherches, notamment en menant des études fiables sur l’exactitude du diagnostic.
La formation des médecins à la science du microbiote et à l'interprétation des rapports est également essentielle pour l'intégration future. Ce consensus constitue une feuille de route fondamentale pour le développement et la mise en œuvre responsables des tests du microbiote dans la pratique clinique.