Glyphosate : des impacts inquiétants sur le microbiote intestinal et le cerveau
Dysbiose, troubles de l’humeur, maladies neurodégénératives, problèmes psychomoteurs… Les conséquences potentielles de l’exposition au glyphosate seraient loin d’être négligeables, selon une synthèse publiée par des chercheurs polonais.
- Comprendre les microbiotes
- Microbiote et troubles associés
- Agir sur nos microbiotes
- Publications
- À propos de l’Institut
Section professionnels de santé
Retrouvez ici votre espace dédiéen_sources_title
en_sources_text_start en_sources_text_end
A propos de cet article
Devinette : je suis l’herbicide le plus utilisé sur la planète. Je suis considéré comme cancérogène probable par l’OMS. Je viens pourtant d’être réautorisé pour 10 ans en Europe. Qui suis-je ?
Réponse : Le glyphosate !
Si vous avez trouvé la bonne réponse, bravo ! Sachez cependant que ces trois informations sont loin de résumer tout ce qu’il y aurait à dire sur le
(sidenote:
Glyphosate
C’est la molécule active du Roundup, un désherbant « total » mis sur le marché en 1974 par Monsanto. Elle tue toutes les adventices (mauvaises herbes) en bloquant chez elles une enzyme, nommée EPSPS, intervenant dans la synthèse de certains acides aminés indispensable à leur croissance. Redoutablement efficace, facile d’utilisation et peu cher, le glyphosate est le pesticide le plus utilisé dans le monde. Il est considéré comme probablement cancérogène pour les humains par le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) et serait également perturbateur endocrinien (même si ce dernier aspect reste controversé). Depuis 2000, date d’entrée du brevet dans le domaine public, on le retrouve dans un grand nombre d’herbicides utilisés en agriculture. Dans plusieurs pays, notamment en France, aux Pays Bas ou en Belgique, il est interdit aux particulier et dans les espaces publiques.
Source : Muséum d’Histoire Naturelle et Inrae
)
, une molécule que l’on retrouve aujourd’hui partout, dans l’eau, l’air et les aliments, particulièrement dans les céréales et les légumineuses. 1
Selon une revue des études qui se sont intéressées aux conséquences d’une exposition à cette molécule et aux herbicides qui en contiennent, ses effets seraient sur le microbiote et le cerveau. 2
Les Français fortement exposés au glyphosate
Selon une étude menée sur 6 848 volontaires de 84 départements, le taux d’exposition des Français au glyphosate serait très élevé. 3
Des traces de ce pesticide aurait été retrouvés dans les fluides corporelles de 99,8% d’entre eux, avec un taux moyen de 1,19 µg/L, dix fois supérieur au maximum autorisé dans l’eau de boisson. Les consommateurs de produits bio seraient moins impactés alors que ceux utilisant l’eau du robinet, de sources ou de puits le seraient davantage.
Les taux sanguins seraient plus élevés au printemps et en été, en périodes d’épandages, et également chez les hommes, les plus jeunes et les agriculteurs, en particulier les viticulteurs.
Les bactéries intestinales fortement perturbées
Plusieurs études menées sur des animaux montrent par exemple que, même à faible dose, le glyphosate augmente les bactéries pathogènes intestinales, diminue les bactéries bénéfiques et impacte fortement l’abondance de deux grands groupes bactériens : les Firmicutes et les Bacteroidetes.
On sait que le maintien d’un ratio adéquat de Firmicutes/Bacteroidetes est un facteur clé de l’équilibre du microbiote et qu’une variation de ce ratio est un marqueur de (sidenote: Dysbiose La « dysbiose » n’est pas un phénomène homogène : elle varie en fonction de l’état de santé de chaque individu. Elle est généralement définie comme une altération de la composition et du fonctionnement du microbiote, provoquée par un ensemble de facteurs environnementaux et liés à l’individu, qui perturbent l’écosystème microbien. Levy M, Kolodziejczyk AA, Thaiss CA, et al. Dysbiosis and the immune system. Nat Rev Immunol. 2017;17(4):219-232. ) , un déséquilibre en jeu dans divers troubles et maladies.
Le glyphosate déstabiliserait également fortement l’axe intestin-cerveau connu pour influencer notre comportement, notre mémoire, nos émotions, mais également notre immunité et nos hormones. Un certain nombre d’études suggèrent que, chez les rongeurs et les humains, une exposition à cet herbicide perturbe les bactéries intestinales impliquées dans l’axe intestin-cerveau, notamment celles qui jouent un rôle bénéfique contre certains troubles de l’humeur.
Un impact sur l’ensemble du système nerveux
Mais ce n’est pas tout ! Le glyphosate impacterait aussi significativement la barrière hémato-encéphalique (la membrane qui protège le cerveau) et pourrait altérer la formation et la survie des neurones, ou encore la transmission de l’influx nerveux. Ceci pourrait avoir des conséquences notables sur :
- la santé mentale : anxiété, dépression, idées suicidaires… ;
- les capacités cognitives et sociales : troubles de la mémoire, anomalies du comportement social ou exploratoire… ;
- la locomotion : paralysie, troubles psychomoteurs… ;
- le risque de pathologies neurodégénératives : maladies de Parkinson, Alzheimer ou d’Huntington, sclérose en plaque…
Troubles neurologiques
Si ce travail de synthèse pose plus de questions qu’il n’apporte de réponse, il a le mérite de souligner que des progrès doivent encore être réalisés pour évaluer précisément les risques sur la santé de l’exposition au glyphosate. Cet herbicide étant, encore aujourd’hui, utilisé massivement dans de nombreux pays, c’est une question de santé publique mondiale.