Gras, sucre et maladies métaboliques : microbiote intestinal et immunité mis sur la table
Manger trop gras et trop sucré favorise l’obésité et le diabète de type 2, c’est un fait. Aujourd’hui, on sait aussi que le microbiote intestinal et son système immunitaire interviennent dans la régulation du métabolisme. Mais décrypter les mécanismes en jeu n’est pas une mince affaire ! Des scientifiques1 y sont parvenus et dévoilent que l’excès de sucres pèse lourd dans la balance.
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A propos de cet article
Cela relève du bon sens. Une alimentation de type « (sidenote: Régime occidental Alimentation riche en aliments transformés, en sucre raffiné, en sel, en graisses saturées (viandes rouges) et graisses trans (viennoiseries) Zinöcker MK, Lindseth IA. The Western Diet-Microbiome-Host Interaction and Its Role in Metabolic Disease. Nutrients. 2018 Mar 17;10(3):365. ) », souvent trop riche en graisses et sucres a un impact sur notre santé. Ce régime alimentaire a en effet tendance à augmenter l’inflammation de l’organisme et à dérégler le métabolisme. Il peut ainsi engendrer une obésité, un diabète de type 2 ou un syndrome métabolique. Or selon de nombreuses études, le microbiote intestinal et son système immunitaire sont largement impliqués dans l’équilibre métabolique : dans nos intestins se produisent des perturbations qui transforment des excès alimentaires en kilos supplémentaires et en sérieuses maladies.
Plus de gras, plus de sucre, c’est moins de cellules immunitaires intestinales qui équilibrent le métabolisme
Pour mieux comprendre ces dérèglements, des chercheurs ont nourri des souris pendant 4 semaines avec un régime riche en graisses et en sucres. Conséquence attendue, ces souris suralimentées ont davantage pris de poids et développé un (sidenote: Le syndrome métabolique Association de plusieurs anomalies métaboliques : pression artérielle élevée, tour de taille élevé, triglycérides et glucose sanguins augmentés associés à un faible taux de « bon » cholestérol dans le sang Alberti KG, Zimmet P, Shaw J. The metabolic syndrome--a new worldwide definition. Lancet. 2005 ; 366 (9491) : 1059-62. ) que des souris nourries normalement. L’analyse de la flore intestinale des crottes de souris a montré que ce régime avait rapidement engendré la perte d’un type particulier de bactéries de leur microbiote intestinal, les (sidenote: Bactéries filamenteuses segmentées Les bactéries filamenteuses segmentées (SFB) sont des bactéries de la famille des Clostridiales qui colonisent l’intestin de nombreux animaux vertébrés et invertébrés, sans provoquer de réponse inflammatoire. Au contraire, leur présence stimulerait la réponse immunitaire. Ces bactéries aideraient la différenciation et la maturation de certaines cellules de défenses et favorisaient l'élimination de microbes pathogènes. Hedblom GA, Reiland HA, Sylte MJ, et al. Segmented filamentous bacteria–metabolism meets immunity. Frontiers in microbiology. 2018 Aug 24;9:1991. https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2018.01991/full ) . Cette perte a elle-même diminué la production de certaines cellules immunitaires, les (sidenote: Lymphocytes Th17 (T helpers 17) Les cellules Th17 sont des cellules du système immunitaire qui jouent un rôle dans la défense de l'hôte contre les agents pathogènes, en particulier au niveau des barrières épithéliales, comme la barrière intestinale. Awasthi A, Kuchroo VK (2009) Th17 cells: From precursors to players in inflammation and infection. Int Immunol 21:489–498. ) , puis le syndrome métabolique est apparu.
Les chercheurs ont découvert que ces Th17 régulaient l’absorption des lipides dans les intestins et étaient nécessaires à la protection contre le syndrome métabolique. Et qu’à l’inverse, leur perte était responsable des effets néfastes de l’alimentation riche en graisses et sucres sur la santé. En administrant aux souris suralimentées des bactéries filamenteuses segmentées, la production de Th17 a été relancée. Résultat : les souris ont perdu du poids et amélioré leur métabolisme.
Le sucre, meneur de l’association de malfaiteurs métaboliques !
Mais entre le gras et le sucre en excès, qui est le plus « coupable » ? L’effet du régime riche en graisses et en sucres (dont du sucrose et de la maltodextrine, courants dans les bonbons et sodas) a été comparé avec celui d’un régime riche en graisses mais pauvre en sucres. Verdict : les sucres modifient à eux seuls la composition du microbiote intestinal au détriment des bactéries filamenteuses segmentées - qui rappelons-le, stimulent les Th17. Alors suffit-il d’éliminer le sucre de l’alimentation pour s’assurer une protection contre les maladies métaboliques ? Pas complètement observent les chercheurs, la protection requiert également la présence des cellules Th17 induite par le microbiote intestinal.
Bref, le syndrome métabolique, l’obésité et le diabète de type 2 dépendent d’interactions complexes entre alimentation, microbiote intestinal et immunité. Selon les chercheurs, il n’y a pas un régime « universel » qui pourrait fournir l’effet recherché chez tout le monde : une approche personnalisée des troubles métaboliques est nécessaire. A l’avenir, elle pourrait tenir compte des variations du système immunitaire du microbiote intestinal entre les individus.