Colique du nourrisson
« Les cris de mon nouveau-né ? Le son le plus déchirant qu’il m’ait été donné d’entendre»1, confessent de nombreux parents dans l’incapacité d’apaiser les pleurs inexpliqués de leur bébé et qui arrivent démunis dans le cabinet de leur pédiatre. Les symptômes sont souvent difficiles à identifier et peuvent représenter une épreuve pour les parents… Encore faut-il savoir les reconnaître… et les comprendre ! Et si la clé se trouvait dans le microbiote intestinal de votre nourrisson ?
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A propos de cet article
Qu’est-ce la colique du nourrisson ?
La colique infantile se caractérise par des pleurs excessifs de cause inconnue chez des nourrissons qui sont par ailleurs en bonne santé. Les potentielles causes de ces coliques seraient à chercher dans les désordres gastro-intestinaux2 (immaturité du tractus gastro intestinal, allergie ou intolérance au lait de vache, reflux des bébés3) mais d’autres causes, sans rapport avec le système gastro-intestinal3 sont aussi étudiées comme le stress parental4 ou encore le tabagisme maternel2.
Les coliques des bébés sont monnaie courante mais leurs symptômes, à commencer par les pleurs continus de l’enfant, peuvent être une source d’inquiétude pour les parents.
Le saviez-vous ?
Le mot « colique » vient du grec “κoλικóς,kolikos” en référence au colon. Cependant, en dépit d’années de recherche, la cause demeure toujours inconnue et rien ne permet d’affirmer avec certitude que les intestins (et donc le colon) du nourrisson sont en cause5.
Quels sont les symptômes de la colique du nourrisson ?
L’enfant pleure beaucoup, il est inconsolable, il grimace et peut avoir le visage rouge. Il garde les poings serrés et peut avoir des gaz5. Pour diagnostiquer la colique du nourrisson, les pédiatres ont longtemps utilisé la « règle des 3 », introduite en 19546. Ces critères ont depuis été adaptés, et une association internationale a fourni une nouvelle définition avec les critères suivants : « périodes récurrentes et prolongées d’agitation, pleurs ou irritabilité du nourrisson, signalés par les parents, qui surviennent sans cause évidente et ne peuvent pas être prévenus ou résolus par les soignants, sans retard de croissance du nourrisson, de fièvre ou de mauvaise santé »7.
Et le microbiote intestinal du nourrisson dans tout ça ?
Un lien entre les coliques du nourrisson et le microbiote intestinal – appelé également flore intestinale – a récemment été établi8. Des études scientifiques ont en effet révélé que le microbiote intestinal des nourrissons concernés différait de celui des autres bébés9 :
- Leur microbiote est moins riche en bactéries bénéfiques (
(sidenote:
Bifidobactéries
Bactéries, en forme de batônnet, en Y. La plupart des espèces sont bénéfiques pour l’homme. Elles sont retrouvées dans les intestins de l’homme, mais également certains yaourts.
Ces bactéries :
- Protègent la barrière intestinale
- Participent au développement du système immunitaire, aident à lutter contre l’inflammation
- Favorisent la digestion, améliorent les symptômes gastro intestinaux Sung V, D'Amico F, Cabana MD, et al. Lactobacillus reuteri to Treat Infant Colic: A Meta-analysis. Pediatrics. 2018 Jan;141(1):e20171811. O'Callaghan A, van Sinderen D. Bifidobacteria and Their Role as Members of the Human Gut Microbiota. Front Microbiol. 2016 Jun 15;7:925. Ruiz L, Delgado S, Ruas-Madiedo P, et al. Bifidobacteria and Their Molecular Communication with the Immune System. Front Microbiol. 2017 Dec 4;8:2345. ) et (sidenote: Lactobacilles Bactérie en forme de batônnet, dont la caractéristique principale est de produire de l’acide lactique. C’est pour cela que l’on parle de « bactéries lactiques ». Ces bactéries sont présentes chez l’homme au niveau des microbiotes oral, vaginal, intestinal, mais aussi sur les plantes ou chez les animaux. On peut les consommer dans les produits fermentés : produits laitiers comme certains fromages et yaourts, mais aussi des d’autres types d’aliments fermentés : les cornichons, la choucroute etc.. Les lactobacillus sont aussi consommés dans les probiotiques, certaines espèces étant reconnues pour leurs propriétés bénéfiques. W. H. Holzapfel et B. J. Wood, The Genera of Lactic Acid Bacteria, 2, Springer-Verlag, 1st ed. 1995 (2012), 411 p. « The genus Lactobacillus par W. P. Hammes, R. F. Vogel Tannock GW. A special fondness for lactobacilli. Appl Environ Microbiol. 2004 Jun;70(6):3189-94. Smith TJ, Rigassio-Radler D, Denmark R, et al. Effect of Lactobacillus rhamnosus LGG® and Bifidobacterium animalis ssp. lactis BB-12® on health-related quality of life in college students affected by upper respiratory infections. Br J Nutr. 2013 Jun;109(11):1999-2007. ) notamment8 : ces bactéries pourraient moduler la réponse immunitaire permettant d’apporter une protection contre les coliques5). - A la place, leur microbiote semble être colonisé par d’autres espèces (Escherichia coli5, Klebsielles ou d’autres potentiellement pathogènes5).
Ce déséquilibre du microbiote intestinal, qu’on appelle « (sidenote: Dysbiose La « dysbiose » n’est pas un phénomène homogène : elle varie en fonction de l’état de santé de chaque individu. Elle est généralement définie comme une altération de la composition et du fonctionnement du microbiote, provoquée par un ensemble de facteurs environnementaux et liés à l’individu, qui perturbent l’écosystème microbien. Levy M, Kolodziejczyk AA, Thaiss CA, et al. Dysbiosis and the immune system. Nat Rev Immunol. 2017;17(4):219-232. ) », semble fortement associé aux coliques : une des hypothèses est que l’altération de la composition du microbiote intestinal modifierait la motilité intestinale (la manière dont se déplace les aliments dans l’appareil digestif), engendrant un excès de production de gaz5.
Inflammation intestinale : suivez la calprotectine !
C’est une protéine (la calprotectine), qui permet d’ identifier une inflammation intestinale. On la retrouve en grande quantité chez les nourrissons souffrant de colique. Elle est associée à une diversité réduite du microbiote intestinal9.
Soulager les bébés… et les parents ?
La consultation de votre médecin reste le tout premier moyen de diagnostiquer une colique du nourrisson et de rassurer les parents. Il n’existe pas de traitement à proprement parler10 contre les coliques mais des pratiques quotidiennes simples peuvent permettre de faire disparaître les symptômes. Parmi celles-ci, l’allaitement, le portage ou encore l’équilibrage du microbiote intestinal de l’enfant notamment à travers les probiotiques5. Cette piste semble d’ailleurs prometteuse puisque l’apport en « bonnes » bactéries pourraient réduire l’inflammation intestinale6 et aider à réduire la durée journalière des pleurs après quelques mois d’utilisation11. Les probiotiques peuvent être également utilisés en prévention pour maintenir un bon équilibre intestinal5.
Cet article est issu de sources scientifiques validées mais ne se substitue pas à un avis médical. En cas de symptômes, n’hésitez pas à consulter votre médecin généraliste ou le pédiatre de vos enfants.
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1 Groopman J. The Colic Conundrum. The crying that doctors can’t stop. Annals of Medicine, Sept 17, 2007 Issue. https://www.newyorker.com/magazine/2007/09/17/the-colic-conundrum
3 Gupta SK. Is colic a gastrointestinal disorder? Curr Opin Pediatr. 2002 Oct;14(5):588-92.
8 Verduci E, Arrizza C, Riva E, et al. Microbiota and infantile colic: what’s new? Int J Probiotics Prebiotics. 2013; 8(1):25–28
15 Tannock GW. A special fondness for lactobacilli. Appl Environ Microbiol. 2004 Jun;70(6):3189-94.