Covid-19 : la mortalité prédite par des bactéries du microbiote oropharyngé ?
Et si l’abondance de bactéries du microbiote oropharyngé suffisait à prédire la mortalité des patients Covid-19 dès leur admission à l’hôpital ? C’est ce que semble montrer cette étude, qui confirme au passage combien les traitements antibiotiques ou la ventilation déstabilisent ce microbiote.
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A propos de cet article
Exit la stratification des patients Covid-19 admis à l’hôpital au regard de leur âge ou de leur obésité. Demain, la mesure de l’abondance de 2 espèces bactériennes du microbiote oropharyngé pourrait être la référence, car plus fiable. C’est en tout cas ce qui ressort des travaux d’une équipe allemande qui s’est penchée sur ce microbiote au rôle central : il régule l'immunité de l'hôte, l'homéostasie des muqueuses et la défense contre les pathogènes. Pourtant, les précédentes études s’étaient révélées peu concluantes. Sans doute parce que la majorité d’entre elles s’était penchée sur des patients atteints de COVID-19 sévère, pour lesquels de nombreux facteurs de confusion (antibiotiques, ventilation mécanique invasive…) avaient pu impacter la diversité et la composition du microbiote prélevé.
Quand les antibiotiques et la ventilation perturbent le microbiote oropharyngé
Cette étude clinique transversale et multicentrique (7 centres germaniques) a donc adapté sa méthodologie : des microbiotes oropharyngés ont été prélevés chez 72 adultes en bonne santé, 112 patients souffrant d'une infection autre que le SARS-CoV-2 (infections respiratoires supérieures légères ou pneumonie critique), et des patients avec une COVID-19 légère (36), modérée (37) ou grave (65). Soit au total 322 participants âgés de 21 à 93 ans.
Les résultats ? L'administration d'antibiotiques à large spectre et la ventilation mécanique invasive semblent déstabiliser le microbiote oropharyngé : une perte de diversité et une dysbiose sévère sont confirmées chez les patients COVID-19 admis dans un hôpital avec une COVID-19 modérée ou sévère ou lorsque le prélèvement était réalisé durant une hospitalisation prolongée.
Deux espèces bactériennes prédisent la mortalité
Mais surtout, les échantillons prélevés rapidement après l'admission (pour ne pas être perturbés par les soins hospitaliers) présentent une signature prédictive de la mortalité liée au COVID-19 à l'hôpital, d’après des modèles d’intelligence artificielle (apprentissage automatique). Ainsi, l’abondance moindre de deux genres bactériens, Neisseria (et plus spécifiquement l’espèce Neisseria subflava) et Haemophilus (espèces Haemophilus influenzeae, parainfluenzae et pittmaniae) accroît fortement le risque de décès. Et ce modèle prédictif s’avère plus fiable que les modèles reposant sur des variables cliniques comme l’âge, le sexe ou l’obésité. Les mécanismes en jeu ne sont pas encore décryptés mais ces bactéries pourraient réguler les réponses immunitaires innées et la production de cytokines.
Ainsi, la signature du microbiote oropharyngé, facilement accessible à l'admission, pourrait permettre une stratification des patients. Avec, à la clé, un meilleur suivi, une prise en charge adaptée dès les premiers stades et une optimisation des moyens et du personnel de soins intensifs alloués.