Microbiote intestinal : pas encore « adulte » à 5 ans ?

Une étude suédoise montre qu’à 5 ans, le microbiote intestinal (MI) s’approche de sa configuration adulte… sans toutefois en atteindre sa maturité. Les éclairages qu’elle apporte sur la dynamique de colonisation du MI soulignent l’importance de préserver le MI des perturbations durant toute l’enfance.

Publié le 24 juin 2021
Mis à jour le 30 juillet 2024

A propos de cet article

Publié le 24 juin 2021
Mis à jour le 30 juillet 2024

La colonisation du microbiote intestinal (MI) commence à la naissance, par contact avec les micro-organismes de la flore vaginale de la mère en cas d’accouchement par voie basse, ou avec les germes cutanés de la mère et l’environnement en cas de césarienne. Elle se poursuit progressivement jusqu’à 2-3 ans en composant, selon différentes études, une communauté microbienne stabilisée de type « adulte ». Mais dès lors, le MI a-t-il véritablement achevé sa maturation ? Des chercheurs suédois ont étudié la dynamique de la constitution du MI pendant les 5 premières années de vie sur une cohorte de naissance de 471 enfants (302 nés par voie naturelle, 169 par césarienne). Le profil de leur MI a été établi par séquençage du gène de l'ARNr 16S sur des échantillons fécaux prélevés durant la première semaine de vie, à 4 mois, à 12 mois, à 3 ans et à 5 ans. Il a été comparé à celui des mères et d’adultes en bonne santé. Principal résultat : la diversité alpha (des espèces) des échantillons des enfants, représentative de la richesse de leur MI, est à 5 ans toujours inférieure à celle des adultes.

Une maturation par paliers qui se poursuit dans l’enfance

En mesurant la prévalence et la proportion des principaux taxons à chaque âge étudié, les auteurs ont pu observer que le MI se développait à des vitesses différentes selon les enfants mais sur des trajectoires relativement similaires. C’est entre 4 et 12 mois, au moment de la diversification alimentaire, que sa composition change le plus fortement. Il est notamment colonisé par Ruminococcus gnavus, dont la part diminue progressivement à partir de 12 mois. Certaines archées comme Methanobrevibacter et des bactéries appartenant aux Christensenellaceae, typiques du MI adulte, apparaissent à partir de 12 mois seulement et continuent à augmenter entre 3 et 5 ans. Cette dynamique semble essentielle à la maturation du MI : plus le MI est diversifié chez les enfants, plus il contient ces taxons « tardifs » et moins il contient de R. gnavus. Or des études ont déjà montré qu’un MI peu riche et un excès de R. gnavus étaient liés à diverses pathologies (syndrome métabolique, maladies cardiovasculaires, maladies inflammatoires chroniques de l’intestin) et que l’abondance de Methanobrevibacter et Christensenellaceae, entre autres, était associée à la santé métabolique et à un Indice de Masse Corporel plus bas.

Un équilibre à préserver des perturbations

Sans établir de recommandations à ce stade, les auteurs de cette étude largement relayée dans la presse soulignent donc la probable grande sensibilité du MI aux perturbations pendant sa constitution, avec des effets profonds sur la santé. Certaines de leurs constatations sur l’impact de facteurs précoces sur le développement du MI sont toutefois étonnantes. La prise d’antibiotiques, pendant la grossesse de la mère et la première année de vie du nourrisson, n’affecte ainsi pas la diversité du MI au cours du temps.Quant au mode de naissance, il semble jouer un rôle limité : la diversité du MI des enfants nés par césarienne est certes plus faible à 4 mois que chez les enfants nés par voie basse, mais elle se normalise à l’âge de 3 ans. Le développement harmonieux du microbiote intestinal devrait donc être au maximum préservé, sans doute au-delà de 5 ans, afin de donner aux enfants tous les atouts pour un avenir en bonne santé.