Microbiota 9 - Mars 2020
Chers lecteurs,
premier antibiotique, la pénicilline fut découverte par le bactériologiste écossais Alexander Fleming en 1928. L’événement lui valut d’être, conjointement avec deux autres chercheurs, lauréat du prix Nobel de physiologie et de médecine en 1945 et fut une véritable révolution dans le traitement des maladies infectieuses. Les bénéfices apportés par les dizaines de molécules disponibles sont un progrès gigantesque dont nous profitons encore à l’heure actuelle.
Cependant, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) alerte régulièrement sur le mésusage des antibiotiques. Aussi bien en santé humaine qu’en production animale (6 500 tonnes par an, hors Chine et États-Unis), la surconsommation a conduit à l’émergence de bactéries résistantes (environnementales et pathogènes). « La menace que fait planer la résistance aux antimicrobiens n’a jamais été aussi imminente ni le besoin de solutions aussi urgent », s’alarmait début 2020 le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’institution.
Dans le sillage de l’OMS, le Center for Disease Control and Prevention (Atlanta, États-Unis) a publié en 2019 une liste de 18 espèces bactériennes résistantes – majoritairement pathogènes – et considérées comme des menaces inquiétantes, sérieuses, voire urgentes. Chaque année, environ 35 000 décès sont attribuables à ces bactéries aux États-Unis, et 33 000 en Europe (données 2015) ; selon certains scientifiques, ces chiffres pourraient s’élever à 10 millions à l’horizon 2050, et même dépasser le nombre de décès par cancers.
Et le microbiote intestinal n’est pas indemne : les antibiotiques affectant non seulement les pathogènes mais également la flore commensale, son équilibre s’en trouve altéré – parfois durablement : son retour à la « normale » peut prendre 1 à 3 mois et s’avérer incomplet chez certains individus. Dans cette édition, le Pr. Francisco Guarner (Barcelone, Espagne) explique les dommages collatéraux de la dysbiose associée à la prise d’antibiotiques ; il passe en revue ses conséquences à court, moyen et long termes, à l’échelle de l’individu et des populations.
Bonne lecture.
BMI 20-01