Antibiotiques et microbiote intestinal : quels impacts sur le long terme ?
Dans une vaste étude, une équipe Néerlandaise compare l’impact de 15 classes d’antibiotiques sur la composition du microbiote intestinal jusqu’à 4 ans après la prise.
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A propos de cet article
A l’occasion de la semaine mondiale pour un bon usage des antimicrobiens (18-24 novembre 2020), l’OMS a encouragé le grand public, les personnels de santé et les décideurs à adopter les meilleures pratiques afin d’éviter que n’apparaissent des résistances aux antimicrobiens et qu’elles ne gagnent du terrain. Alors que les antibiotiques constituent l’un des plus grands progrès thérapeutiques du XXème siècle, ils peuvent également avoir un impact négatif sur les différents microbiotes du corps. Si l’effet à court terme de certaines classes sur le microbiote intestinal est connu, les effets sur le long terme ne sont pas encore bien décrits pour certaines. Dans cette étude, l’impact de 15 classes d’antibiotiques sur la composition du microbiote intestinal a été comparé jusqu’à 4 ans après la dernière prise.
Etude à « grande échelle »
La composition du microbiote intestinal provenant de 1413 participants ayant consommé des antibiotiques (âge médian : 62,6 ans) a été analysé par séquençage de l’ARNr 16S. La durée entre la dernière prise d’antibiotiques et le prélèvement de selle a été calculée et classée ainsi : moins d’un an, entre 1 an et 2 ans, entre 2 ans et 4 ans, plus de 4 ans. Les résultats ont été ajustés en prenant en compte certains facteurs confondants (sexe, âge, IMC, diabète, certains médicaments tels que les statines, IPP, corticoïdes…).
Acclamés comme l'une des avancées majeures de la médecine du XXème siècle, les antibiotiques ont sauvé des millions de vies. Mais ils ont aussi un impact sur notre microbiote en provoquant des dysbioses. Examinons de plus près ce rôle ambivalent.
Le rôle ambivalent des antibiotiques
Impact conséquent des macrolides et lincosamides
L’impact le plus important et le plus prolongé sur le microbiote intestinal était observé pour les macrolides et lincosamides : diminution de l’indice de Shannon qui perdure 4 ans après la dernière prise et modification significative de la structure de communauté bactérienne (indice Bray-Curtis de diversité). Aussi, l’utilisation des bêta-lactames révèle une perte significative de diversité un an après la prise.
Qu'est-ce que la Semaine mondiale de sensibilisation à la résistance aux antimicrobiens ?
Depuis 2015, l'OMS organise chaque année la Semaine mondiale de sensibilisation à la résistance aux antimicrobiens (WAAW) dont l'objectif est de sensibiliser sur le phénomène mondial de la résistance aux antimicrobiens.
Cette campagne, qui se tiendra du 18 au 24 novembre, encourage le grand public, les professionnels de santé et les décideurs à faire un bon usage des antimicrobiens afin d'éviter l'apparition de résistance.
Impact des antibiotiques à forte activité anti-anaérobie
Les résultats révèlent aussi que l'utilisation d’antibiotiques ayant une forte activité anti-anaérobie (associations d'une pénicilline et d'un inhibiteur des bêta-lactamases, les dérivés imidazolés, lincosamides) avait un impact plus important et prolongé sur le microbiote intestinal comparativement aux autres classes. Le ratio Firmicutes/Bacteroidetes était significativement modifié en faveur des Firmicutes jusqu’à un an après la prise. A l’inverse, ce ratio était significativement modifié en faveur des Bacteroidetes jusqu’à 2 ans après une prise d’antibiotique sans activité anti-anaérobie.
Ainsi l’utilisation des macrolides et lincosamides est associée à une dysbiose profonde et durable du microbiote intestinal. L’impact et la durée diffèrent selon les classes d’antibiotiques employées et les auteurs soulignent que ces effets devraient être considérés lors des prescriptions.