Une équipe italienne détaille le travail de sape de certaines bactéries et champignons à l’œuvre sur une toile baroque du XVIIe siècle. Elle a également identifié trois espèces bactériennes susceptibles de s’opposer à de telles détériorations.
En matière d’art, biodégradable rime rarement avec durable. La détérioration des œuvres artistiques et des édifices par les micro-organismes est une menace redoutée par les conservateurs du patrimoine du monde entier. C’est le cas à Ferrare dans l'Eglise de Santa Mario in Vado où l’ (sidenote:
Le couronnement de la vierge
), toile de 1620 du peintre italien Carlo Bononi, a souffert des affres du temps, des éléments (un tremblement de terre en 2012)… et des microbes.
Un cocktail idéal
Des chercheurs de Ferrare ont apporté leur pierre à l’édifice : pour restaurer de cette toile, ils ont analysé la vie microbienne qui s’était développée sur l’œuvre. En prélevant des échantillons sur la peinture – initialement au plafond et désormais posée au sol dans une niche de l'église – l’équipe italienne a pu observer deux types de bactéries : des Staphylococcus au recto, la partie la plus altérée, et des Bacillus au verso. Car cette peinture typique du XVIIe siècle est recouverte de pigments naturels, dont certains font le délice de ces bactéries, en particulier la laque rouge, la terre rouge et la terre jaune. Associés à des conditions idéales de température, d’humidité, et de luminosité, le cocktail était parfait pour assurer la croissance de ces bactéries "peinturovores".
À chaque zone ses champignons
Chaleur et forte humidité font aussi le lit des champignons : les scientifiques ont décelé dans d’autres zones, plus sombres, des moisissures Aspergillus et Penicillium, ces deux espèces étant également retrouvées dans les musées et bibliothèques abritant des peintures et des supports papier. Les régions plus claires (rosées ou bleu ciel tirant sur le jaune) abritaient quant à elles des Cladosporium spp. tandis que la partie de l’œuvre au contact du sol était le siège de levures Alternaria.
Soigner le mal par le mal / Des bactéries sauveuses
Identifier les agresseurs est une chose, trouver des sauveteurs en est une autre, bien meilleure. Cette même équipe italienne y est parvenu : elle a découvert que trois espèces de Bacillus pouvaient empêcher la croissance et les effets néfastes de micro-organismes friands de couleurs. Elles seraient donc toutes désignées comme alliées restauratrices de peintures et œuvres artistiques soumises aux attaques microbiennes. À condition seulement de s’assurer qu’elles-mêmes n’altèrent en rien lesdites œuvres. (Art)work in progress donc.
Old sources
Sources :
E caselli et al, Characterization of biodegradation in a 17th century easel painting and potential for a biological approach, PLoS One. 2018 Dec 5;13(12):e0207630